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jeudi, 04 juin 2009

Mathias Enard à l'Autre Rive

Mathias Enard

Zone

 

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prix Livre Inter 2009

lauréat librairies Initiales 2008

 

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Mathias Enard est né en 1972 à Niort.Ses horizons maritimes et littéraires l'attirent vers la méditerranée: il devient syrien à Damas, libanais à Beyrouth, égyptien au Caire, il exhume les dernières bouteilles oubliées par Lowry et Durell au Cécil Hotel d'Alexandrie et se réveille à bord du transsibérien quelques pages plus tard.
Il apprend "par le coeur" chaque langue, chaque culture, plonge dans les entrailles des conflits et des êtres, interroge l'intime dans l'universel et..."dans un bâillement, il avalerait le monde...".
J'aurai le grand bonheur d'accompagner cet écrivain dans sa résidence d'écriture, à Rochesson, au coeur des montagnes vosgiennes et de franchir la Moselle avec lui et Mathieu Loigerot (à la contrebasse), répondant à l'invitation de l'Autre Rive.

                                                                                 Olivier Dautrey

                                                            Résidence d'écrivains en Lorraine

                                                                      La Pensée sauvage, à Rochesson

mercredi 17 juin 2009 à 18h30

Commentaires

Allez, je vais vous achever Ossip Mandelstam « Le Timbre Egyptien » ed. le bruit du temps.

Petit ouvrage (une soixantaine de pages de texte en soi + préface et postface) en petit format (17*12), mais intense et passionnant à lire. Texte tout en décalé. Cela commence par un incipit « je n’aime pas les manuscrits roulés. Certains sont lourds, tout imbibés de graisse par le temps, semblables à des trompettes d’Archanges ». Ainsi défini, l’auteur peut y aller de sa narration, et des efforts déployés par le héros, Parnok, pour récupérer sa queue de morue. (Pour ceux qui ne fréquentent pas les soirées chic, on dit aussi queue de pie. Ne pas confondre avec le pinceau éponyme). L’allusion à Gogol (le manteau) est claire et ses références (Le Nez, ou Le Double(de Dostoievski)) aussi. Et le pauvre Parnok va devoir disputer son bien avec le capitaine Krzyzanowski, le tout dans des références très centrées sur Petersbourg (Sankt Peterburg). On y croise aussi bien Pouchkine que Santos Dumont ou Lucien de Rubempré ainsi que des Hollandais montés sur des échasses, ou « Kerenski et son gouvernement de nouilles ». on y croise aussi toute une pléiade de compositeurs, de Bach (le grand Jean-Seb), à Schubert (celui de l a truite) et à Beethoven (celui de la pince à linge). Donc le pauvre Parnok poursuit son manteau et son périple, tel Leopold Bloom dans les rues de Dublin. Il va lui aussi chez son coiffeur. Mais là, « son sang de lapin se réchauffait instantanément sous la serviette velue ». (Beau sujet de bac : commentez et argumenter cette phrase….). Bref le tout est à l’avenant, belle odyssée à travers la ville, avec toujours un coté grinçant (la blanchisserie où Parnok croit reconnaître sa chemise, ou celle du capitaine K ci-dessus nommé) ou la loi qui s’est évaporée (la querelle entre Parnok et le capitaine K au sujet de sa chemise). Et puis par-dessus tout, des allusions au froid, gel de tout (la cantatrice A Bosio, morte gelée), allusion au crime de l’état contre la culture, ou de Saint Petersbourg versus la chaleur de la Crimée ou de l(‘Arménie (ou Mandelstam passe 5 ans, déjà suspect d’être contre révolutionnaire). On connait sa fin après les affres de Voronej, puis celles de la Kolyma.

Beau livre à lire donc.

Par contre, j’ai été moins emballé par ses autres œuvres en prose telles« le bruit du temps » ou « la quatrième prose » (Bourgois). Le « voyage en Arménie » (Mercure) est bien sur un retour à une situation plus calme.
Sa poésie est très belle, toute différente de ses autres œuvres. V. Chamalov (« Récits de la Kolyma », Verdier ) raconte qu’il s’en récitait des passages pour atténuer ses souffrances (et celles de ses compagnons de misère). Lisez d’ailleurs cet ouvrage (par petits paquets, tellement c’est dense), et puis le bouquin est épais (1536 p). Mais tellement bien écrit
« Chaque instant de la vie des camps est un instant empoisonné. Il y a là beaucoup de choses que l’homme ne devrait ni voir ni connaître ; et s’il les a vues, il vaudrait mieux pour lui qu’il meure ».
un peu comme le silence qui suit du Mozart, c'est encore du Mozart, la c'est du Mandelstam.
et dire qu'en plus il pleut.....

Écrit par : jlv-mon pote ossip | samedi, 06 juin 2009

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« Zone » de Mathias Enard (Actes Sud)

Voila un livre qui se lit d'un trait : une seule phrase mais de 516 pages (en fait un peu moins car il y a 2 ou 3 chapitres de souvenirs avec ponctuation) et 24 chapitres (cf l’Iliade). Cela ne gène en rien la lecture (et le récit) de ce voyage en train entre Milan et Rome, villes distantes de 500 km environ (une page par km). Voyage entrecoupé de souvenirs (cauchemars ?) des « actions » menées par le narrateur lors de ses missions en ex-Yougoslavie ou dans le Proche Orient. Bien sur, on va retrouver les atrocités communes à toutes les guerres. On pense quelquefois au bouquin de J Littel « les Bienveillantes » (A ce propos une bonne analyse sur ce dernier dans la livraison de juin de Books – magazine français bien fait de l’actualité littéraire internationale http://www.booksmag.fr/magazine/a/faut-il-bruler-les-bienveillantes-1.html ) ou à celui de C Malaparte « Kaputt », excusez du peu.

Cauchemar donc ou rève éveillé, entrecoupé par des évocations de personnes plus douces. Stéphanie l’alsacienne, collègue et amante d’un temps révolu, mais dont le souvenir est toujours tenace, et Marwan, ami tué quelque part au Liban. Souvenirs qui passent. On se demande par moments si le livre n’est pas celui du souvenir ou plutôt du ne pas oublier. Que ce soit celui des personnages, Yvan, autre agent, ou des combattants palestiniens ou yougoslaves. Ne pas oublier non plus toutes ces atrocités, que ce soit Sobibor ou Theresienstadt, ou plus près de nous Beyrouth et en Bosnie-Croatie. Ne pas oublier. Est ce que cela impose cette longue phrase et ce voyage en train. Tout se lie, on ne peut ni quitter la phrase, ni le train, même si de brefs moments (le bar) permettent un instant d’oublier (le gin), tout revient. L’histoire ne prendra fin que lorsque la précieuse valise auquel il est attaché-menotté aura été livrée au Vatican. Pourquoi le Vatican et ses trente deniers (ceux qui lavent tous les péchés du monde ?). L’Eglise complice silencieuse de toutes ces atrocités.

Je reviens à Malaparte. (« Kaputt » et « La peau » viennent de ressortir chez Denoel). Lisez aussi ces deux pavés (570 et 403 pages). Idem quand on commence, on ne peut quitter le livre. Mais l’évocation des chevaux gelés du Lac Ladoga, qui ouvre « Kaputt » est inoubliable. Un peu comme celle du panier d’yeux (ou d’oreilles) que l’on retrouve dans « Zone » ou les « Les bienveillantes ». Est ce finalement un trait de culture des Oustachis. Les yeux, toujours cette référence au non-oubli, et ce panier porteur de tout ce qu’ils on vu et que l’on garde.

Dernier trait et référence au monde grec. On peut se poser la question des allusions à l’Illiade ou à l’Orestie. Désirs de vengeance ou désirs de justice ? Le Vatican a t’il remplacé l’ancienne Olympe. A vrai dire je préfère encore « le roi barbu qui s’avance » au « monsieur tout blanc ».

Écrit par : jlv-zone | dimanche, 07 juin 2009

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