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mardi, 25 novembre 2008
Le convoi de l'eau d'Akira Yoshimura
Comme Les Oiseaux du norvégien Vesaas ou La Saga de Youza du lithuanien Baltouchis, Le Convoi de l’eau du japonais Akira Yoshimura qui vient de paraître chez Actes Sud pourrait bien devenir l’un de ces livres qui marquent de leur empreinte indélébile la mémoire des lecteurs, établissant entre eux et leurs libraires une délicieuse complicité.
La magie de ce livre tient autant à l’atmosphère envoûtante d’une vallée de haute montagne noyée de brume et de pluie qu’à l’art du narrateur découvrant peu à peu une étrange communauté peuplant un hameau oublié des hommes et condamné à être englouti sous les eaux pour laisser place à un immense barrage.
Fable sur notre monde actuel massacreur de planète ? peut-être. En tous cas une provision d’images inoubliables.
Jean-Bernard
Le convoi de l'eau d'Akira Yoshimura, Actes sud, 16 €
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Commentaires
une partie du tout
à lire (le tout et non pas une partie, quoique une partie donne idée du tout)
brillant et drole à la fois.
jasper dean, quelque peu etouffe par son pere, (re)découvre son oncle terry incarcéré dans une prison que la famille a contribué à construire.....
ce dernier est devenu célèbre (en australie) en assassinant des sportifs souçonnés de corruption. il meurt dans l'incendie de ladite prison et devient alors un héros.
le père de jasper ne se remettra jamais de ce frère devenu célèbre alors que lui n'a rien qui inspire la confiance.
toute une série d'idées plus ou moins farfelues découlent (une boite à idéee à la porte de la mairie, un système pour devenir millionnaire...), toutes vouées à la catstrophe ainsi que des rencontres du meme tonneau (annick, la gaichiste, ou eddie).
un feu d'artifice constant. a lire
Écrit par : jlv | jeudi, 12 mars 2009
Répondre à ce commentairele convoi de l'eau (recommandé par jean-bernard, il convenait de le lire (c'est fait)).
récit assez linéaire sur des relations quelquefois troubles entre les habitants d'un hameau d'une vallée perdue (on songe au film la vallée perdue) et une équipe d'ouvriers chargée de construire un ouvrage qui noiera la vallée.
Récit aussi qui suscite des retours sur soi du narrateur (qui a assassine sa femme et ne garde d'elle que des fragments d'os). Toute la complexité des relations japonaises. Se souvenir que Yoshimura a écrit "la guerre des jours lointains" (acte sud), un livre qui a pour cadre les atrocités commises à la fin de la guerre sur les prisonniers américains et dont le "héros" traqué par la police fuit, à en perdre son identité. Ou encore "voyage vers les étoiles" (acte sud) ou un des récits décrit un homme prélevant des fragments osseux sur des cadavres (toujours les os....).
bref un auteur japonais (il y en a d'autres) moderne (post guerre) mais reprenant les grands thèmes du pays (l'attitude face aux étrangers, les coutumes ancestrales, les relations homme-femme, le délinquant face au public) avec une vision et une écriture toute descriptive.
c'est ainsi que jean bernard avait raison (ca fait un peu citation à la vialatte)
Écrit par : jlv | samedi, 21 mars 2009
Répondre à ce commentairepuisqu'il ne reste plus de commentaires a faire en dehors des 2 ou 3 precedents....
restent les conseils de Louise... (aah Louise..)
donc va pour la lecture de
l'escadron guillotine de G. Arriaga (points phebus)
le grand souffle de l'Histoire (cette grande dame, comme cela est dit au milieu du livre (j'ai perdu la page)
enfin le grand souffle, qui fait enfin revivre la tante (tatie Sensualité, alias maria magdalena del perpetuo socorro) du principal personnage (le licenciado velasco)
et surtout la rencontre historique de Pancho Villa avec Zapata (juste avant la demonstration historique des manifestations dudit escadron sur le Zocalo (la grand place) de Mexico.
le souffe de l'Histoire, avais je dit. celui qui vous donne une grande claque (je ne precise pas ou) et qui vous laisse sans voix (normal lorsqu'il s'agit de l'armee revolutionnaire de Pancho Villa).
(attention ne pas confondre souffle de la revolution et haleine chargee desdits soldats).
on voit que l'histoire remet en sa juste place le capitaine velasco (en charge de son invention spectaculaire) aux grades subalternes (affecte aux cuisines) mais ensuite replace a sa juste valeur au grade de colonel de l'armee revolutionnaire (je vous le disais, le souffle de l'Histoire).
a noter aussi la folle equipee du soldat ching wong tsu, epave siniesque dans cette illiade mexicaine...
enfin le passage bref de belem (subtile flashback sur une reintegration livresque du karma de louise (on voit le clin d'oeil editorial))
bref un livre a lire (qu'en faire d'autre, maintenant que les nuits de cristal sont passees), surtout en cette annee de litterature mexicaine.
attention ne pas oublier les autres mexicains par ex: malcolm lowry, "en dessous du volcan", pour ne citer que le plus celebre consul de Quauhnahuac
ou les reeditions de B. Traven (autre mexicain notoire)
Écrit par : jlv | samedi, 28 mars 2009
Répondre à ce commentaireallez, un autre pour la route (si l'on peut dire; lire ou conduire, il faut choisir).
lu ce WE (entre autres)
das Kapital (de V Berberian, gallmeister) traduit par Claro, c'est deja un bon point, edite par Gallmeister, un second) le reste des bons points se perd au fil des pages. Ca commence bien, legerement decale et caustique, mais tres vite on se lasse, avec quelques longueurs ou passages plus ou moins abscons (l'abus de langage ou de tournures supposees branchees).L'intrigue aussi s'efiloche.
desole.
les treize alligators G. Bolan , La dragone. 116 pages (ca suffit).
idem au debut c'est un peu drole, puis ca tourne au roman de gare (desole pour la dragone).
la reine des lectrices (A. Bennett, Denoel & d'ailleurs). court (174 p) mais c'est bien comme ca. Comique relativement british, a consommer donc a froid. on y retrouve quelques portraits (?) d'auteurs (J. Genet H. James ou les soeurs Bronte). un portrait (?) de SM la Reine aussi quelque peu etire sur plusieurs chapitres. des portraits de la cour (un delicieux Sir Kevin) ou des rencontres royales dont un navrant premier ministre francais, quasi inculte (n'aurait il point lu la princesse de cleves ?)
bref petit ouvrage (2 bonnes heures) distrayant.
a propos d'auteurs anglo-saxons (de ce type d'humour), (re)lisez donc :
Ring Lardner : Y en qui les aiment froides
De l'influence negative des femmes sur les performances des champions
(tous deux chez B Pascuito, parution en 05)
Robert Benchley Psychologie du pingouin
l'expedition polaire a bicyclette
deux titres chez le dilettante
ou plus recemment Remarquble n'est ce pas chez Toussaint Louverture
et pour finir (la bonne bouche)
Stephen Leacock le plombier kidnappe
l'ile de la tentation
tous 2 au Dilettante egalement (avec des couvertures de Glen Baxter), c'est deja tout un programme.
avec ca, la crise n'a qu'a bien se tenir (et la pirouette pour finir) : si V Berberin avait lu ces auteurs, il n'aurait pas eu a ecrire son pensum (et pourtant on le (lui ou Wayne son heros du livre) disait cultive...)
Écrit par : jlv | lundi, 30 mars 2009
Répondre à ce commentaireEncore lui....
Allez, une critique élogieuse cette fois (pour racheter les autres)
«Pauvreté, Richesse, Homme et Bête» de Hans Henny Jahn chez José Corti (couverture jaune d’or).
Déjà rien qu’à voir l’éditeur, on ne peut que penser du bien - ah, la frèle stature de José Corti, tout de noir vétu, assis à sa table, en face du Luxembourg…, et le joyeux désordre de sa librairie, avec un classement spécial des œuvres (en entrant, à droite, les livres a prix réduits, parce que plus très neufs (coupés, ou légèrement tachés)).
Ensuite, l’auteur Hans Henry Jahn (traduit par les époux Radrizzani, autres monstres sacrés pour la littérature allemande (A Stramm, A Holz, E. Toller ou J Potocki), ce qui est aussi une référence de rigueur dans ce genre de textes. Cf sa biblio (Google doit connaitre) dans les années 20-40. Auteur encore trop méconnu en France, malgré son édition chez Corti (Perrudja, les 3 tomes de Fleuves sans Rives) ou son théatre plus inégal (Médée, le Pasteur Ephraim Magnus) ou ce dernier ouvrage édité Pauvreté, Richesse, Homme et Bête (PRHB). A lire de toute urgence tant c’est bien écrit (chose qui devient rare de nos jours). Et puis c’est plein de références à la nature et aux bêtes (les écolos vont aimer, ces bêtes qui mangent du foin…). Enfin, c’est un style nouveau (Perrudja a été totalement réécrit après la lecture d’Ulysse de J Joyce), avec l’introduction de parties musicales (des chansons dans PRBH).
Un autre jour je parlerai de ces écrivains « nouveaux » qui à la suite de J Joyce ont modifiés les styles de la langue (HH Jahn, Arno Schmidt, Julio Cortazar, Julian Rios). La défunte revue « la main de singe » était très bien pour ca.
Donc j’en reviens à ce livre (théatre). Il faut en parler à la Manu (quoique Charly doit le connaître). L’histoire : non pas la reprise d’un mythe, comme Médée (homme – femme, civilisé – barbare) ou comme Gilgamesh dans les cahiers de Gustav Anias Horn, mais celle d’un conte de Grimm (revu et corrigé) avec des relations homme – femme – animaux (attention c’est pas zoophile). Je n’en dirai pas plus, mais cette relation humain – bête (souvent cheval -jument- d’ailleurs dans Perrudja ou dans PRHB) est omni présente dans les livres de HH Jahn. Perrudja est essentiellement centré sur cette relation, quelquefois équivoque entre Perrudja, paysan norvégien et sa jument Shabdez. On y retrouve la recherche de la femme, accompagnée (la recherche, pas la femme) par un rival et un compagnon quelque peu équivoque lui aussi.
Donc dans PRHB, on retrouve ce quintette ou plutôt sextette (avec une femme en plus, mais toujours une jument) qui évolue, avec aussi le thème de la mort et de la pourriture qui revient souvent (d’où nécessité de construire un grand « mausolée » en pierre pour la jument (ou pour la femme aimée, l’une ou/et l’autre). Autre thème récurrent, celui de la méchanceté des hommes, entre eux ou (plus grave ?) envers les animaux. On tue la jument dans PRHB, mais (c’est là que le mythe - conte intervient) la tête de la jument revient parler aux vivants, les accablant de remords.
Ce thème du remord est lui aussi central à HH Jahn (cf Fleuves sans Rives). Dans le premier tome de la trilogie (Le Navire de Bois), le capitaine, sa fille et Gustav (le fiancé de la fille), embarqué clandestinement, se retrouvent sur un étrange navire de bois (d’où le titre, et non le nom du capitaine), ce qui réveille, bien sûr, tous les fantasmes des marins. Bien sur la fille disparait, assassinée. C’est le prélude au naufrage du bateau. Par la suite (Les Cahiers de Gustav Anias Horn), on retrace le naufrage, l’angoisse de Gustav devant la mort, ses aventures plus ou moins exotiques (avant de finir en Norvège), et toujours cette relation ambigüe entre Gustav et l’assassin de sa fiancée (avec qui il parcoure le monde). On retrouve, à la mort de celui-ci le thème de la pourriture (la momification du corps de sa fiancée que Gustav traine avec lui), la lutte incessante contre le destin (errance) et souvenir incessant qui taraude les esprits (avec en plus des « résurrections » ou « réincarnations » du type de celle de la jument dans PRHB). On trouve aussi la désespérance devant la méchanceté de l’homme. C’est commencé juste avant guerre (1936 et fini en 1949), donc HH Jahn savait à quoi s’en tenir quand au statut de Mensch (avec ses variantes Uber ou Unter) (entre parenthèse, il est intéressant de noter que Mensch vient du Yiddish….).
Entre temps HH Jahn a laissé d’autres traces (facteur d’orgues et restaurateur de l’orgue Schnitger à St Jakobi, Hambourg, pas des moindres) et écolo antinucléaire notoire après guerre (anti-militariste et adversaire du nazisme, on s’en serait douté).
Écrit par : jlv | mardi, 31 mars 2009
Répondre à ce commentairePour changer, cette semaine je vais vous parler d’un éditeur, Attila.
Oh pas la peine d’un large sac pour y caser tous ses titres, tout d’abord parce que la maison n’existe que depuis ce printemps (cf leur site), et puis ce sont de petits livres (des chefs d’œuvre d’édition en fait) ou des tirages déjà épuisés.
Commençons donc par la fin (et de fait toute chose a une fin, sauf la saucisse qui en a deux, comme le dit un proverbe allemand).
La tombe du tisserand de Seumas O’Kelly
Dès le début, on met en scène une veuve (celle dudit tisserand), un cloutier et un casseur de pierres, plus accessoirement (quoique ce ne soient pas que des accessoires), deux fossoyeurs jumeaux (quoique la gémellité ne soit pas parfaite, on s’en apercevra à la fin du livre). On rajoute à ça un vieillard grabataire (mis à la tête pas si perdue que cela), tonnelier (et sa fille Nan). Voilà pour les personnages (ça fait des économies de description et de caractères). Le lieu : Cloon na Morav (le Champ des Morts), ça se passe en Irlande, vu le nom de l’auteur (assassiné parce que membre du Sinn Fein).
Le reste de l’histoire : à vous de la lire (je vais tout de même pas faire tout le boulot). Et puis ou serait le plaisir de la lecture. Et dans ce cas c’est un vrai régal. Même si ça se lit vite (122 p), c’est bien écrit avec des passages truculents.
Pour le livre (dans toutes les bonnes librairies, et l’Autre Rive en fait partie). Une belle présentation (avec une couverture en calque), une très belle mise en pages (cf la typographie du nombre de tirage, qui change avec chaque livre), une illustration soignée elle aussi, séparée du livre sous forme d’un dépliant.
Cela m’amène au second titre de chez eux (que j’avais en réserve de lecture) et qui m’a fait la fin de la journée.
Ascension de Ludwig Hohl
Le jour et la nuit, la mer et la montagne, le noir et le blanc (ça c’est pour l’illustration à chaque chapitre, et il y en a une vingtaine en 182 p).
Deux amis partent en ascension, dans les Alpes Suisses (c’est écrit entre 1916 et 1940) à l’époque où il fallait monter dans les montagnes à pied. Même sobriété dans les personnages (« Nietzsche fait alpiniste » dit la critique du Canard Enchainé). Encore plus belle illustration que dans le livre précédent. Tirage soigné et même couverture en calque.
A part ça, l’histoire est en fait une nouvelle, très bien écrite, style pur, sans fioritures, à la fin esquissée, sans (pas besoin) grandes descriptions inutiles (le style de la nouvelle, à la fin abrupte (en coup de bêche, auraient dit les fossoyeurs du livre précédent).
Bref deux petits joyaux (ça vaut ceux de la couronne (cf une critique précédente).
En recherchant ce que cette (toute nouvelle et prometteuse) maison d’édition avait déjà publié, je suis tombé sur :
Gog de Giovanni Papini (roman monstre dit le 4 de couverture).
Evidemment…..(quoique ce soit publié par Le Nouvel Attila). On a donc dès le départ un Nouvel Attila antérieur (mars 07) à Attila actuel (mars 09). (L’Histoire ne se répète pas, mais là, elle recule…, et comme le disait Pierre Dac, il suffit de se retourner pour l’avoir dans le dos).
Gog donc, de G. Papini. Auteur plus que bizarre, avant-gardiste encore plus avancé, amateurs de contrepieds (?) dit le 3 de couverture, il finira fasciste (déjà sa tendance naturelle à faire des autodafés de livres médiocres).
Roman protéiforme, irracontable, sous forme de textes courts (4-5 p) écrits de Cuba, 7 novembre, à Arezzo, 7 juillet, mais était ce bien le même millénaire et la même planète ?, prix Nocturne en 2006, devant Neige d’Anna Kavan, (annoncé par lesdites éditions Attila). Je m’en régale d’avance (Jean Bernard, un exemplaire, merci),
Gog (en réalité Goggins) est un milliardaire, un peu (euphémisme) déjanté (un de ceux avant la crise). A ne pas confondre avec Gog et Magog, les 2 rois des peuples de géants qui préfigurent l’Apocalypse (quoique le Gog du livre soit roi de Magog)
Donc Gog, « né dans une des iles Hawaii, d’une mère indigène et d’un père inconnu », fait la rencontre de l’auteur (ou plutôt vice versa) dans….. une maison de fous. Avec une préface de G Papini pareille, le livre ne peut que promettre.
La suite est donc la publication des feuillets (écrits à l‘encre verte) de ce personnage. On y trouve une visite à Einstein (qui jouait du violon), avec des idées fortes sur la physique, traduites en une formule simple « Quelque chose remue », puis une visite à Freud (« à la bouche charnue et sensuelle, un peu faunesque » qui réunit dans la psychanalyse « les trois écoles littéraires de Heine, Zola et Mallarmé, sous le patronage de Goethe ». on y trouve aussi des références à Darwin (ou plutôt un retour sur image) et même un retour sur Pythagore (celui du théorème, aussi, qui chose intéressante, avait aussi une cuisse en or).
Bref, vous l’aurez compris, un livre indispensable à la culture de tout homme raffiné (je n’ai pas dit raffariné). Dommage que le livre soit (pour l’instant) épuisé chez l’éditeur.
Que dire encore de ces éditions Attila (http://www.editions-attila.net/attila.html). Elles sont toutes neuves (printemps 09, je l’ai dit) et résultent de la rencontre de deux personnes qui se réclament de Jean Jacques Pauvert et d’Eric Losfeld (dixit leur site). Donc, avec des fées pareilles penchées sur leurs berceaux, on ne peut que se réjouir de la descendance. Ah le grand JJP et sa librairie du Palimugre (juste au pied de l’ex Tour de Nesle) et EL (avec des chaussettes rouges dans sa boutique, pas très loin de la maison de S Gainsbourg. (tiens un de ces jours, je disperserai toute (ou presque) leurs collections).
En conclusions, lisez ces livres et encouragez ces passionnés de l’édition.
Écrit par : jlv | samedi, 04 avril 2009
Répondre à ce commentaireLa Mort à Venise (version allemande), la version anglaise est masculinisée (le Maure à Venise), quant à la version traduite en lorrain (Le Maure qui Trompe) n’a qu’un lointain rapport.
C’est l’histoire d’un citoyen allemand, appelons-le Gus, fils de fonctionnaire et semi oisif. Arrivé à la cinquantaine, il a déjà écrit quatre (4) livres, en travaillant de deux à trois heures par jour(ce qui fait 15 années par livre). Le reste de la journée, il erre en tram à travers Munich. A ce stade, il décide de s’octroyer une pause – quelques mois- (c’est écrit en 1913, avant la grande crise, les gens connaissaient la vraie valeur du dur labeur). Et puis comme tout citoyen de ce pays, il part pour Trieste et Pola, où il ne se sent pas à l’aise, bien sur (déjà des problèmes d’agence et de réservations en Croatie). Donc en route pour Venise (faut bien justifier le titre du bouquin). Chambre à l’Hotel des Bains, avec sa foule d’estivants cosmopolites (femmes, enfants, gouvernantes (je vous l’avais dit, c’était avant les congés payés, et les maris sont restés à lutiner les soubrettes). Il y a surtout un groupe de polonais, dont la mère, la gouvernante, le fils et les filles (les pauvres, en raides robes grises, déjà confites en religion et bonnes manières).
Et là le Choc. On se dit, bon, c’est ça va être la mère (avec son collier à trois rangs de perles grosses comme des cerises) (la couleur n’en est pas précisée, mais on peut penser que c’étaient des cerises noires, qui sont évidemment rouges lorsqu’elles sont vertes. Rimbaud en aurait fait un sonnet). A la limite (en cas de commandite pour la collection Harlequin), c’eut été la gouvernante. Pour le reportage dans Closer, voire dans Gai Pied, on aurait suggéré le petit gérant « de style français »). Bref ce n’était point cela du tout, mais le gros nœud rouge sur le maillot de bain du jeune T. (mineur, ça va de soi). A partir de là, le livre devient chaotique. Départ de Venise, mais en fait seule la malle de Gus part pour Côme, lui revient à l’Hotel des Bains (on reste sans nouvelles de la malle).
Au changement de chapitre, le jeune T. en profite également pour changer de maillot de bain, bleu et blanc. S’ensuit un long épisode où Sénèque et Phèdre sont appelés au renfort, de même que Kleitos, Képhalos et Eos (attention, bien que l’auteur soit allemand, ce n’est pas sponsorisé par VW). A noter que l’histoire de ce trio n’est pas forcément à mettre entre toutes les mains. Et ceci avant que, moment suprême, on interdise tout d’abord de manger huitres et coquillages (ah ces allemands, toujours le souci de l’hygiène), et que enfin, on assiste à la lente avancée du choléra et de son arrivée inopinée à Venise (l’agence de voyage avait prévenu, les terres exotiques sont pleines de chausse-trappe et de pièges). Comme l’action se passe dans la Sérénissime, le choléra donne lieu à de joyeux déguisements (toujours cette propension des méditerranéens à dédramatiser. Tenez, lors d’un tremblement de terre, ne parle t’on pas aux sans abris d’une gigantesque partie de pique-nique. C’est pratiquement du Begnini avant les frères Lumière). Cela force le jeune T. à remettre son beau maillot à nœud rouge (entre temps la gouvernante a du le faire laver). Naturellement l’histoire finit mal, avec la découverte du corps de Gus, affaissé sur le bras de sa chaise (on avait prévu la mère, la gouvernante, le fils, finalement ce sera la chaise). On peut espérer pour son éditeur de Munich qu’il lui avait envoyé un manuscrit de son dernier ouvrage.
Finalement une belle histoire (un vrai livre, avec encore des pages a découper (c’est à La Bibliothèque des Arts). Avec une bonne bande son, on devrait pouvoir en faire un film.
Désolé pour l’auteur, mais n’y a-t-il pas eu cette question courte à un examen en Normandie en 1857 « une bourgeoise s’ennuie, s’amourache et s’arseniate ». Développer en 490 pages….
Allez, tant qu’on est à Venise…..
Lisez donc « La Partita » de Alberto Ongaro chez Anacharsis, avec une belle dame (borgne ?) sur la couverture bleue (la couverture, pas la dame, surtout pas bas-bleu).
Triste histoire (c’est normal, ça débute à Venise comme dans la chanson) ; et même une Venise en hiver (il y neige, un peu comme une autre chanson, décidément). La lagune est prise par les glaces (les glaces de Venise, il va de soi). Le héros, charmant jeune homme, revient d’exil à Corfou (une sombre histoire de mineures…, ça ne rigolait pas en ce temps là, fin du XVIII). Tout cela pour découvrir que son père l’a ruiné au jeu (adieu veau, vache, cochon; couvée). Et comble, la charmante comtesse (celle de la couverture ?) en fait l’enchère d’une partie de totons. Que ceux qui n’ont jamais vu de totons me demande, j’en ai une belle collection (de totons, non de comtesses. Les sans culottes sont passés par là entre temps). Et que voulez vous qu’il advint ? Il perdit. S’ensuit une rébellion envers la dite comtesse, fuite du jeune homme poursuivi par deux redoutables frères et sicaires (surtout sicaires). Escale chez son frère et belle sœur (où celle ci…..) puis une autre sœur de ladite belle-(sœur) (re où celle ci…., puisqu’ils s’enfuient ensemble). Toujours l’Italie sous la neige et les royaumes (c’était bien avant la République, Le Duce et le Condotierre). Entre temps le beau jeune homme fera parvenir sa vengeance indirectement via une dame de petite vertu au père et à la comtesse. Un bref séjour dans un château, avec mille chiens, quelques sangsues et deux turcs (qui seront égorgés, les pauvres), le maitre des lieux (80 printemps, mais là on est encore en hiver) et sa dame (8 ou 10 ans, mais attention, ça reste très décent, ce qu’est qu’une question d’héritage). C’est fort bien écrit, sans fioriture (ça date de 1986), quelques passages à la Fellini (dit le 4 de couverture, cf les personnages cités plus haut). Bien plaisant en ces temps de crise et de marasme.
A la prochaine.
Écrit par : jlv | vendredi, 10 avril 2009
Répondre à ce commentaireHwang Sok-Yong
Aujourd’hui, je vais changer. Tout d’abord, partir d’un article du Monde (samedi 25 avril) en page 3 (la page où un journaliste se lache…), page consacrée au dernier livre de Hwang Sok-Yong.
http://www.lemonde.fr/archives/article/2009/04/24/coree-du-sud-un-nobelisable-mise-sur-internet_1184938_0.html
Je sais, ce n’est pas un nom qui dise grand chose. Et pourtant, c’est tout d’abord un écrivain (tiens on retombe dans la catégorie livres). Ensuite, il est nobélisable (dit le titre du papier). Son dernier livre (« l’étoile du berger », non encore traduit) est sorti tout d’abord sur le net (et non sur papier). Enfin, et ce n’est pas la moindre qualité, ses bouquins sont remarquables (tous chez Zulma, la très bonne maison d’édition).
Donc en avant pour vous faire découvrir ce très bon auteur.
Coréen (du Sud), mais avec un passé (vécu) qui remonte à avant la guerre de Corée et donc à la séparation des deux pays (épisode douloureux, dans tous les sens du terme). Donc auteur en provenance d’un pays mal connu et surprenant à plus d’un titre pour un occidental. Tout d’abord une arrivée à Incheon, sur une ile à une cinquantaine de km de Seoul. Paysage plat, lagunaire et autoroute qui n’en finit pas. Et puis les batiments de Seoul… Sarcelle à coté, ce sont des pavillons de banlieue (même le Haut du Lièvre à coté, ça fait minable). C’est pas vraiment la foule, quoique ils soient en nombre. Besogneux (cf les 4 dragons asiatiques), mais aussi violents dans leurs réactions (cf les manifestations étudiantes) (et aussi surprenant que cela soit, les cités étudiantes ne sont pas encore mixtes). Donc on s’attend à une certaine démocratie « orientée » (il y a les voisins du Nord qui donnent le mauvais exemple), bien que la vie soit occidentalisée (il y a même un TGV qui roule, et à l’époque dans leur journal du train on y ventait l’inauguration du TGV Est).
J’avais donc envie de lire les auteurs de ce pays, et j’ai commencé par Hwang Sok-Yong (« le Vieux Jardin ») (j’arrive enfin là où je voulais en venir).
« Le Vieux Jardin »: le choc. Gros pavé (574 pages), mais passionnant (à tous les sens). C’est une histoire très pudique (tout à fait les coréens) entre une artiste (décédée) et un homme vieillissant (autobiographie en partie) qui sort de prison -18 ans d’isolement pour opposition politique (je vous ai dit qu’ils ne rigolaient pas dans le pays). Retournant dans ses souvenirs et lieux de mémoire, le « héros » ne retrouve que le journal intime de l’artiste. Et là ça devient un roman tout en nuances, très pudique. Finalement les 500 et qq pages se lisent très bien. On en prend plein la figure des récits de son internement et isolement (mais en fait, très vite il se barricade dans un refuge intérieur. On découvre toute la nostalgie d’un peuple qui avait cru à un changement possible de société, après la fin de la guerre (celle avec le Japon tout d’abord (l’ennemi héréditaire), puis avec les Chinois (qui voyaient là une occasion de prendre du territoire). Utopie d’une société, représentée par le jardin et par l’idéalisation de l’artiste, sans cesse opposée à la violence de la répression au cours de laquelle l’auteur a été poursuivi, traqué, puis arrété, et enfin rééduqué.
Ayant lu ce bouquin, j’ai cherché à en savoir plus et à lire donc « L’invité » et « Les terres étrangères » (toujours chez Zulma).
« Les terres étrangères » en fait deux nouvelles (127 pages) suivie de « la prospérité » (60 pages). On retrouve la condition ouvrière qui a donné lieu au militantisme de l’auteur (HSY), des gens pauvres, exploités par un système. Condition ouvrière avec les mauvais traitements qui vont avec, ce que l’auteur (et certains Coréens) dénonçaient à l’époque et qui a valu l’emprisonnement de l’auteur. Des ouvriers vident la mer, en assèchant une baie de la côte pour gagner des terres et agrandir ou faire une rizière (on imagine l’identique de l’arrivée en Corée (voir plus haut). Naturellement, cet ouvrage donne lieu à toutes les exploitations (ouvriers déplacés dans des baraques loin de chez eux, petits chefs qui méprisent et sous-estiment le travail accompli, salaires inversement proportionnels, etc). Résultat : les ouvriers décident de faire une grève et ça se voit (on n’est pas sous N. Sarkozi).
L’envers de la prospérité promise et réalisée (pour certains) plus tard dans les années 80). C’est Germinal en Asie (sans le coté paupérisme). On retrouve bien sur, les raisons qui ont poussé HSY à son attachement à la cause de l’homme. On retrouve aussi la puissance de l’écriture ainsi que la volonté de poursuivre malgré la prison et l’exil. Un romans à la gloire de l’homme qui souffre.
« L’invité » c’est encore le même thème récurrent de l’engagement, mais mis en scène via un pasteur, exilé aux Usa, qui revient en Corée pour tenter de retrouver et de renouer avec les membres de sa famille. Bien sur, on retrouve l’antagonisme entre chrétien et communiste (et par la même les contradictions des uns et des autres). Il se trouve que ce dernier été tué par le précédent avant son exil (on découvre lentement comment cela s’est passé). Bref des histoires, dénonciations et répression qui remontent à la surface et ne facilitent pas la réconciliation envers ces personnages (et à travers eux entre deux visions de l’histoire de la Corée). Toujours cette écriture puissante qui captive. (on vous l’a dit plus haut : ce serait un auteur nobélisable). Et pourtant, il n’y a pas cette veine d’endoctrinement que l’on trouve dans certains auteurs ouvriéristes. Heureusement, il n’y a pas cette commisération de l’écrivain au ventre plein face aux masses laborieuses (on pense à la chemise blanche bien repassée d’un autre auteur largement dépoitraillé, mais satisfait de manger à l’écurie du pouvoir). C’est au contraire ce que dénonce HSY (cf les Terres étrangères).
Allez pour finir qq autres pistes coréennes
Toujours chez Zulma (on ne dira jamais assez le bien de cette maison (et la beauté de ses couvertures, grace à un nouveau concepteur graphique David Pearson).
Eun Hee Kyung « Les boites de ma femme » 5 nouvelles (220 p en tout) ou les personnages découvrent des boites avec les « secrets » de leur conjoint(e)s. un journal intime, des souvenirs ou des malentendus. Troublante découverte ou révélation des relations homme-femme (l’auteur est une femme).
Kim Young-ha « l’empire de lumières », là c’est chez Philippe Picquier (une autre fois, je vous raconterai les auteurs japonais et indiens (j’ai peu lu les chinois et indochinois) de cette maison, plus orientée asie). On retrouve l’ambivalence et l’antagonisme entre la Corée lu nord et du sud. Agent dormant du nord à Séoul, puis brusquement réveil au moment où il lit un haiku de Basho (le grand auteur japonais (XVII siècle) de ces petits poèmes – il y a un mois, les éditions PP en remettaient une version jeu de voyage et magnétique pour tout achat de 3 livres – faire son haiku à soi- hélas on s’aperçoit vite que n’est pas Basho qui veut ou qui peut). Un roman en 24 heures et 24 chapitres, juste le temps pour l’auteur de se décider à être réactivé (ou exécuté). Naturellement, c’est aussi un retour sur soi, son engagement, ses actions (ou non-actions), et les circonstances qui l’ont amené à cette situation. Quasi un roman noir, fascinant et riche, toute l’ambiguité du changement des situation et de société déjà décrits par HSY.
Voilà c’était la page inspirée du Monde.
Je n’ai pas raconté les lectures plus récentes
le dernier ouvrage de Tinta Blava « Gloire incertaine » de Joan Sales, gros pavé (604 p) avec des éclairages différents sur la guerre d’Espagne (vue du coté des nationalistes catalans, forcément les perdants). 5 ou 6 chapitres chacun décrit par un des personnages, sous des formes diverses (récit, lettre, confession…).
Un livre fort.
Autre merveille dans un tout autre genre « les souris du docteur Ley » (c’est chez Ginkgo) satire étonnante par un allemand de la vie et des affaires en Allemagne pendant la guerre.
Et qq autres livres d’un niveau très inégal
Navrant (quoique intéressant sujet) de Miguel Haler « la route des gitans aussi chez Ginkgo.
Livre dur :« Il ne s’est rien passé à Artolsheim » de A Will (Al Dante), chronique de viols d’enfants en Alsace avec charge sur des vanniers. Sujet terrible et dérangeant sur ces marginaux que l’on accuse à la va vite de tous les maux de notre société.
« Nansen et Johansen » de Klaus Rifbjerg (Circé). La conquète du pole par deux norvégiens et quelques chiens. Egalement une utilisation surprenante de la graisse d’ours (p. 128).
« Une minute de silence » de Siegfried Lenz (Robert Laffont), court récit (124 p) d’une liaison entre un élève et sa prof d’anglais (pas de graisse d’ours ici, bien que l’action se passe sur les bords de la Baltique). Récit très pudique, un peu gris à l’image de la photo de couverture, plage plate et temps de saison).
Écrit par : jlv | dimanche, 26 avril 2009
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